mardi 19 février 2008

9-2 : la Mecque des racailles en col blanc

Sorti le 6 février "9-2, le clan du Président" d'Hélène Constanty et Pierre-Yves Lautrou est un véritable résumé de l'affairisme politique dans les Hauts-de-Seine qui sont à la corruption politique ce que le 9-3 est à la petite délinquance : si dans le 9-3 les racailles font du rap, dans le 9-2 elles font de la politique.

Cet ouvrage s'intéresse à certains personnages locaux comme Patrick Balkany, Charles Pasqua ou André Santini, et résume les affaires qui émaillent la vie politique et économique du département.

Ce département est le plus petit et le plus riche de France après Paris, en 2005 son PIB était de 100 milliards d'euros, son budget de 1,6 milliard d'euros est un des plus important, il concentre le plus de sièges sociaux et a le plus grand quartier d'affaires d'Europe, à savoir la Défense.

La vie du département a connu deux périodes : l'avant Charles Pasqua, et l'après Charles Pasqua...



LE COUPLE BALKANY ET LEVALLOIS-PERRET


Le maire de Levallois-Perret est un des seuls amis proches de Nicolas Sarkozy : ils se sont connus en 1976 à la section RPR de Neuilly, sont tous deux d'origine hongroise, et sont tous deux des « babys Pasqua », car ils ont été formés par le parrain de l'UMP du 92.

Patrick Balkany connaît son baptême politique en 1978 lorsque Charles Pasqua l'envoie à Auxerre afin d'affronter Jean-Pierre Soisson et parvient à le mettre en ballottage. Sa femme Isabelle joue un rôle important dans sa carrière grâce à une expérience de deux ans dans les médias – France Soir, Combat, Europe 1 – qui lui permettra de constituer un carnet d'adresse utile à son mari.

En 1979 Charles Pasqua les envoie à Levallois-Perret afin de récupérer la ville aux communistes : en 1982 Patrick Balkany est élu conseiller général, et en 1983 après une campagne houleuse – ils se font tirer dessus et attaquer à la hache! - il devient maire de la ville, la même année que son ami Nicolas Sarkozy.


Très rapidement les traces de la politique sociale des communistes disparaissent, la ville se couvre d'immeubles modernes en passant par une société mixte, la SEMARELP. Il intéresse aussi les médias en armant la police municipale, en installant la vidéosurveillance, et étonne avec son style « droite bling-bling » avant l'heure.

« Je suis toujours en campagne » affirme Patrick Balkany, ce qui explique sa méthode, à savoir « faire le trottoir » comme dit son épouse : il connaît la ville par coeur, noyaute, interroge ses administrés ou les flatte. Sa femme s'occupe elle de la communication et des « services » : à la limite du clientélisme ils s'occupent des administrés par le biais de différents services à tarifs avantageux. Pour ce qui est des logements sociaux, la transparence dans leur attribution n'est pas leur point fort : l'opposition est exclue de la commission d'attribution.


Tout va pour mieux pour Patrick Balkany, sa femme récupérant par ailleurs son poste de conseiller général. Mais l'ascension connaît un brutal arrêt : lors des élections présidentielles de 1995 il apporte son soutien à Edouard Balladur, et non à Jacques Chirac.

Par ailleurs un juge enquête sur un possible financement occulte du RPR par le biais de l'office HLM de Paris. Son nom : Eric Halphen. Son enquête remonte à l'OPDHLM du 92 tenu par Patrick Balkany et un de ses amis, Didier Schuller. L'enquête fait son chemin, mais a surtout un effet négatif sur l'opinion vis-à-vis des balladuriens.

Jacques Chirac élu, un chiraquien, Olivier de Chazeaux, ravit la mairie à Patrick Balkany.

Et les affaires s'enchaînent : déjà en 1988 le cousin germain d'Isabelle Balkany avait réalisé une plus-value sur un terrain avec la complicité de la ville. En 1990 la Cogedim, promoteur immobilier, avait aussi vendu un appartement aux époux Balkany à moitié prix.

Olivier de Chazeaux découvre aussi quelques irrégularités : trois employés municipaux ont ainsi travaillé pendant des années dans la résidence des Balkany; Didier Schuller indique lui que les époux ont fait salarier le capitaine de leur yacht par des fonds publics; la chambre régionale des comptes met en cause la gestion des oeuvres sociales qui a donné lieu à des détournements, des irrégularités apparaissent aussi dans la gestion sportive, les experts-comptables de la République parlent même de caisse noire et de rémunération occulte.


Mais le Titanic ne coule pas : les affaires s'accumulent, s'enlisent, et après une traversée du désert à la Eddy Barclay, en 2001 c'est le retour. Olivier de Chazeaux n'a pas plu et a fait quelques erreurs. En 2001 Patrick Balkany est réélu maire de Levallois, mais le préfet s'oppose à l'élection suite aux affaires l'ayant touché. Rapidement l'UMP vote une loi rendant éligibles les élus jugés comptables de fait de leur commune...Patrick Balkany est élu député en 2002.

C'est bien le retour et ses amis mouillés dans les affaires se voient attribuer les meilleurs postes! Balka II est de retour...



LES CECCALDI-RAYNAUD : LES CESAR ET MARCUS BRUTUS DE PUTEAUX


Quelle est la commune la plus riche de France? À cette question nombreux répondraient Neuilly-sur-Seine. Et pourtant s'il est vrai que les habitants de Neuilly sont les plus riches de France, la commune de Puteaux est celle qui est la plus prospère. Le motif de cette richesse? Le quartier d'affaires de la Défense dont les deux tiers sont situés sur la commune lui apporte une taxe professionnelle sans équivalents en France : le potentiel fiscal est de 4 000 € par habitant, soit cinq fois plus qu'une commune de même taille! En 2007 la chambre régionale des comptes a eu la surprise de constater que la commune avait un bas de laine de 228 millions d'euros placés en bons du Trésor, ce qui lui permet de percevoir 11 millions d'euros d'intérêt annuel.

Les rues évoquent Disneyland, la commune use de sa prospérité : beaucoup de logements sociaux, beaucoup d'agents municipaux, et des dépenses somptuaires : 90 000 € de frais de petits fours en 2006, un million pour les illuminations de Noël. En 2007 1 800 personnes sont invités à la réception du nouvel an : 550 € de dépensés par personne! Après cela s'ajoutent des cérémonies de voeux plus communautaristes ou plus électoralistes. Et d'autres frais comme Puteaux-Plage ou Puteaux Neige pour un million d'euros.

Et c'est encore mieux pour les familles « bien avec la mairie » : une place sur un village de vacances à un tarif 50 % moins cher qu'au Club Med à Ploemeur (56), La Clusaz (74) ou Crapone (Corse).


Mais la grande particularité de Puteaux c'est le clientélisme. Charles Ceccaldi-Raynaud - « CCR » - accepte de rendre service, fait des cadeaux : ainsi les personnes âgées reçoivent tous les ans des casserolles, un four à micro-ondes ou un téléphone sans fil...Charles Ceccaldi revendique cette politique : « ma politique en matière de clientélisme a été exemplaire. Vous savez ceux qui n'étaient pas d'accord, on ne pouvait pas leur supprimer leur logement. Mais ils obtenaient moins facilement une place dans nos villages de vacances ».

Et les exemples existent : ainsi Stéphane Vazia a eu l'occasion de fréquenter les villages de vacances. Mais tout a changé le jour où il est entré au PS. Son opinion sur « CCR » avait déjà changé le jour où lorsque sa femme a eu une contravention il a écrit au maire pour réclamer des travaux à cet emplacement. Réponse du maire : vous pouvez vous faire payer 50 % de la contravention par le centre d'action sociale!


L'ascension de Charles Ceccaldi-Raynaud est en tout cas digne d'un roman.

Celui-ci a commencé comme commissaire de police puis conseiller particulier de Robert Lacoste en Algérie, et est aussi un des responsables de la SFIO locale. Suite au putsch des partisans de l'Algérie française, il apprends qu'il est menacé d'arrestation et s'enfuit. Il part sur Paris, Georges Dardel maire de Puteaux le nomme directeur de l'office HLM local, puis il devient conseiller municipal . Georges Dardel est alors adepte du socialisme municipal clientéliste et corrupteur.

En 1967 il est victime d'un grave accident de voiture, « CCR » s'occupe de l'intérim. Mais lorsqu'il réclame son poste à son retour Charles Ceccaldi refuse de le lui rendre! Exclu du parti le socialiste se tourne alors vers les gaullistes...la campagne municipale de 1971 est tendue, faisant même un mort au cours d'une fusillade.


Mais Charles Ceccaldi voit plus loin. Il voit ainsi son fils lui succéder, mais suite à son décès il se tourne vers sa fille même s'il critique ses capacités. Ainsi lorsque Brice Hortefeux lui affirme qu'il souhaiterait lui succéder, Charles Ceccaldi lui dit clairement qu'il avait choisi sa fille pour lui succéder.

Pourtant le scénario de Charles Ceccaldi ne fonctionne pas. Suite à une opération médicale il pense qu'il lui reste peu de temps à vivre. Il démissionne de son poste et nomme sa fille pour lui succéder. Il critique les mesures prises par sa fille et son aptitude à diriger la ville. Quand il souhaite reprendre son poste, enfin guéri, sa fille refuse de rendre son siège! CCR agresse alors sa fille par le biais de tracts, ouvre un blog contre sa fille et l'insulte lors de conseils municipaux!


Les Ceccaldi père et fille ont en tout cas un point commun : ils détestent toute opposition. Pour Charles Ceccaldi l'UDF avec qui il s'allie n'est qu'un faire-valoir, il a infiltré le PS pendant des années, et n'hésite pas à user du triptyque intimidations-pressions-action en justice.

Ainsi Nadine Jeanne se voit exclure de son association culturelle lorsqu'elle se retrouve sur la liste de l'opposition en 2001. Des tracts diffamatoires la qualifie de socialo-communiste, de trotskiste, de pro-délinquants.

Bernard Bruet qui dénoncera le scandale du chauffage urbain – on facture aux administrés du charbon alors que la centrale brûle au fioul! - verra sa femme convoquée par le maire pour le ramener à la raison, puis il sera menacé de ne plus recevoir de subventions pour son association.

Même chose pour le blogueur Christophe Grébert qui monte le blog « MonPuteaux.com » très critique pour la direction municipale. Dès lors CCR interdit de rentrer dans les locaux publics du conseil municipal avec un appareil photo. Puis dès qu'il se rends au conseil municipal Christophe Grébert est encerclé par les policiers municipaux. Charles Ceccaldi a même accusé Christophe Grébert de penchants pédophiles...



NEUILLY OU L'AFFAIRISME A SARKOLAND


Neuilly-sur-Seine n'échappe pas à l'ambiance locale. Il y a bien sûr les dérives habituelles : appartement de fonction indû, détournements de bouteilles de champagne et de vin...

Mais au cours de la dernière campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy a surtout été mis en cause pour son ex-appartement sur l'Ile de la Jatte : Nico l'avait en effet acheté 880 000 € en 1997 et revendu 1,9 million d'euros en 2006! Plus tard on découvre qu'il avait bénéficié d'une ristourne de 300 000 € par le promoteur lors de l'acquisition. Généreux? On découvre quelques semaines plus tard que notre bien-aimé président avait lui aussi accordé un rabais de 775 000 € au même promoteur pour la vente de terrains municipaux, au même moment. Mais l'affaire est classée sans suite.


Autre affaire qui touche cette fois un ami de Nico, Thierry Gaubert, qui fut son assistant dans beaucoup de ses activités politiques. A côté de cette assistance Thierry Gaubert s'occupe d'immobilier, notamment du 1 % logement qui impose aux entreprises un prélèvement pour financer le logement de leurs salariés. Thierry Gaubert créé le CIL qui collecte les fonds pour financer les constructions, puis le HPT qui s'occupe des fonctionnaires. Il finance aussi des outils de communication pour la mairie de Neuilly et pour Didier Schuller à Clichy.

Mais dès 1998 plusieurs organes mettent en cause les dépenses douteuses du CIL et du HPT, une plainte est déposée pour « abus de biens sociaux, abus de crédits, exercice illégal de la profession de banquier, abus de confiance, favoritisme, escroquerie au préjudice de l'Etat ». Le dossier est toujours en cours.



MANUEL AESCHLIMANN, LE MACHIAVEL D'ASNIERES


Certaines villes du 9-2 ont été de véritables laboratoires ou objets de propagande pour la France d'après de Nicolas Sarkozy. L'exemple d'Asnières mérite qu'on s'y arrête : cette ville sans originalité était dirigée pendant près de trente ans par un gaulliste, Michel Maurice-Bokanovski. Ajourd'hui la ville fait le bonheur d'Internet et de Dailymotion pour ses calomnies, tracts anonymes, procès en diffamation, mises en examen et surtout ses conseils municipaux houleux. A défaut d'avoir bâti la France d'après, le maire Manuel Aeschlimann a bâti l'Asnières d'après. Mais arrêtons-nous un instant sur le « putsch » de Manuel Aeschlimann, par ailleurs lecteur de Nicolas Machiavel.


A la fin des années 80, « Boka » est un peu lassé par son activité de maire, il lui arrive même de s'endormir lors des conseils municipaux. Il délaisse partiellemnt le pouvoir à son premier adjoint et successeur désigné, Yves Cornic, qui à l'exemple du couple Balkany à Levallois, couvre la ville de chantiers et de ZAC. Certains riverains inquiétés s'organisent en associations.

Manuel Aeschlimann fait lui la rencontre de Frantz Taittinger, issu de la grande famille du même nom. Tous deux se retrouvent dans la liste de « Boka » aux municipales. Tous deux décident alors de trahir leur maire en prenant parti pour les associations de riverains, des tracts anonymes dénoncent la collusion entre le maire et les promoteurs.

En 1991 les deux hommes décident de mettre le maire en minorité au sein du conseil municipal. Ils sont alors exclus du RPR. Ils ne perdent pas pour autant de vue leurs objectifs – cantonales de 1992 et législatives de 1993 – et se voient opposés à Georges Tranchant. La campagne donne lieu à un affrontement entre les gros bras des camps respectifs. On accuse Taitinger de vouloir « faire venir les arabes à Asnières » en se fondant sur les origines algériennes de sa femme. Mais Taitinger triomphe malgré tout, Manuel Aeschlimann devient le premier adjoint en charge notamment de la communication.

Mais notre Machiavel du 92 ne s'arrête pas là ; Taittinger connaît des problèmes de succession familiale et de santé qui le fragilisent, on l'informe aussi qu'Aeschlimann complote contre lui en manipulant des associations de riverains. En 1998 Aeschlimann soutient de manière cachée le candidat UDF aux cantonales : Taittinger perd son siège au profit du candidat socialiste. Il démissionne de son mandat de maire et ne se représentera pas aux législatives. Par bonheur Manuel Aeschlimann est là...


Devenu maire grâce à ce double putsch il met en oeuvre les mesures de Nicolas Sarkozy : lutte contre l'insécurité, instauration d'un couvre-feu pour les mineurs qui lui vaudront les faveurs des médias. Il installe aussi une vidéosurveillance dans la commune. En 2004 il est mis en cause quand son directeur de cabinet s'incruste dans le local chargé de la surveillance. Celui-ci indique qu'un socialiste tracte des « documents injurieux » contre le maire et invite la police à l'arrêter. Le brigadier-chef refuse malgré les menaces. Certains dénoncent alors la déviance vers une police politique. De même Manuel Aeschlimann n'hésite pas à attaquer en justice ceux qui critiquent son bilan pour diffamation.


Mais la grande spécificité de Manuel Aeschlimann c'est le marketing politique qu'il a enseigné à Science-Po : il est ainsi friand de sondages (il en a réalisé plusieurs au profit de Nicolas Sarkozy dans sa longue marche vers l'Elysée), mais aussi d'une conception communautaire de la politique.

En se fondant sur les listes électorales il envoie ainsi cinq magazines différents aux Asniérois en se fondant sur leur âge et leur sexe, afin d'adapter sa communication.

Le pire c'est qu'en 2006 il a constitué des fichiers d'électeurs avec les mentions « Maghreb » ou « sans Maghreb » afin d'adapter sa communication à l'origine ethnique de ses administrés. En 2001 il a réalisé un tract pour les municipales destinés aux Africains et originaires d'Outre-Mer mettant en vedette sa femme, d'origine antillaise. Même chose en 2004 où une de ses adjointes cible l'électorat musulman en parlant d'une mosquée et d'un carré musulman dans le cimetière d'Asnières.


En harmonie avec Nicolas Sarkozy il créé un conseil des communautés, reçoit les différentes communautés ethniques ou religieuses, accorde des aides aux communautés israélites, catholiques, musulmanes ou aux témoins de Jéhovah.


Enfin la dernière spécificité de Manuel Aeschlimann c'est son traîtement des opposants : toute attaque peut mener au procès pour diffamation, la chambre régionale des comptes a ainsi calculé que les frais d'honoraires d'avocat de la ville étaient huit fois plus élevésque dans les villes de même taille du département.

Et au-delà de ses opposants politiques il compte aussi des opposants au sein de son propre camp. Ainsi Josiane Fischer, ex-membre du RPR proche d'Anticor, a été victime comme beaucoup de ses collègues d'un bluff lors du remplacement de Frantz Taittinger par Manuel Aeschlimann : alors que celui-ci avait promis de conserver la même liste pour les municipales, une partie de ses membres a été rayée de cette liste. C'est alors qu'un tract anonyme diffamatoire circule pour les mettre en cause.

Dans la même veine, Manuel Aeschlimann accuse parfois les associations de riverains qui s'opposent à lui d'être des sectes...



ANDRE SANTINI ET ISSY-LES-MOULINEAUX


Le jovial et médiatique André Santini fait lui aussi parti des racailles du 9-2. Il est vrai que dans le département les relations entre l'UMP et le feu UDF sont excellentes. Il est vrai aussi qu'André Santini fait parti des poulains de Charles Pasqua.

Pourtant l'ouvrage d'Hélène Constanty et Pierre-Yves Lautrou montre un personnage moins agréable qu'il n'y paraît : cassant, insultant, auteur de coups bas et de propos diffamatoires...


Et Issy connaît aussi ses affaires.

Il y a tout d'abord le SEDIF, syndicat des eaux d'Ile-de-France, qu'il préside. Les installations sont gérées par Veolia depuis 1923. et André Santini a verrouillé la place en nommant des proches aux postes clés. Mais la chambre régionale des comptes, l'association Service Public 2000 et UFC-Que Choisir ont montré du doigt les prix prohibitifs de l'eau et l'opacité de la gestion : le prix de l'eau serait 2,5 fois trop élevé, les marges trop importantes (58 % de marges).


Mais l'eau n'est pas la seule à poser problème, il y a aussi l'immobilier. Ainsi fin 1990 Elf vend un terrain à une filiale de la Générale des eaux, qui la revend six jours plus tard et fait une plus value de 45 millions d'euros! Motif de cette plus-value : André Santini a voté la création d'une ZAC à cet endroit.

Autres affaire immobilière : la fondation Hamon. Jean Hamon, promoteur immobilier et mécène d'art contemporain, souhaite bâtir un centre d'art contemporain. La structure pour construire et gérer est dirigée par André Santini et Charles Pasqua. Mais les associations de défense de l'environnement contestent le projet. Résultat le permis de construire est invalidé. Mais on apprends que dans le dossier il y aurait des fausses factures, des prêts litigieux et un emploi fictif. Hamon est mis en cause pour faux et usages de faux, abus de biens sociaux, escroquerie et recel de fonds publics.



QUARTIER DE LA DEFENSE : AFFAIRISME DANS LA POULE AUX OEUFS D'OR


La poule aux oeufs d'or pour le 9-2 c'est le quartier de la Défense. Ce quartier d'affaires a été bâti en 1958 : il emploie 170 000 salariés et l'un des plus important en Europe. Nicolas Sarkozy avait établi un programme intitulé « Défense 2015 » afin de relancer l'activité dans le quartier. Et le programme est ambitieux, et nécessaire.

Mais ces travaux sont surtout une opportunité pour certains : le plan récupère quasiment à la lettre les propositions d'un lobby, l'Association des utilisateurs de la Défense qui comprends les vingt deux plus grands propriétaires et occupants du quartier. Mais au vu de la taxe professionnelle et des droits de mutation perçus, dur de les contredire.

Pour réaliser ce programme Nicolas Sarkozy nomme Bernard Bled qui fut mis en examen dans le cadre des emplois fictifs de la mairie de Paris, mis en cause aussi pour la justice pour un logement de fonction ou pour des détournements de fonds publics...Afin de lui donner des outils le Parlement vote en décembre 2006 une loi en urgence et en catimini. Cette loi consacre une OPA du département sur le quartier : le préfet est quasiment exclu des processus de consultation, une disposition fiscale très favorable aux constructeurs est adoptée.

La Cour des comptes a elle mis en cause la transparence de la comptabilité de la gestion du quartier. Quoiqu'il en soit la gestion du quartier sera 100 % UMP : 50 % au département, 25 % pour Puteaux et Courbevoie.


Mais tout ne va pas forcément pour le mieux dans le meilleur des mondes pour la Défense car quelques affaires ont été médiatisées.

Première affaire : celle des mètres carrés fantômes. Selon Hélène Constanty et Pierre-Yves Lautrou il pourrait s'agir de la plus grande violation du code de l'urbanisme en France : des milliers de mètres carrés auraient été construits en tout illégalité. L'interrogation concerne surtout les responsabilités des pouvoirs publics : étaient-ils au courant voire complices de la fraude?

Autre affaire : « l'affaire de la chaufferie ». Une affaire de corruption est ici soupçonnée dans le cadre d'un renouvellement de la concession de chauffage urbain du quartier. La chambre régionale des comptes avait déjà critiqué les marges importantes réalisées dans la gestion et l'absence de contrôle des activités. En tout cas dans cette affaire on soupçonne le bénéficiaire du marché d'avoir profité du soutien de Charles Ceccaldi-Raynaud dans l'obtention du marché.



HLM DU 92 : PETITS DETOURNEMENTS ENTRE AMIS


Dans le 9-2 la politique immobilière est aussi une bonne poule aux oeufs d'or, notamment par le biais des offices HLM. Ce système fut notamment une arme politique à Plessis-Robinson ou Levallois-Perret.

L'affaire des HLM du 9-2 est en tout cas illustrative des déviances du système. Le dossier est « balancé » au juge Eric Halphen grâce à un dossier transmis par le ministre du Budget d'alors, un certain Nicolas Sarkozy, à l'époque où la guerre entre chiraquiens et balladuriens se met en place. Nicolas Sarkozy justifie son choix par le goût de la justice, version que conteste le juge Halphen qui y voit une manoeuvre politique. En tout cas, le juge Halphen découvre tout un système de fausses factures pour le financement occulte du RPR. Ce système consistait pour les entrepreneurs du BTP à émettre des fausses factures afin de financer le RPR, en contre-partie de l'accès aux marchés publics des offices HLM de Paris ou des Hauts-de-Seine et du conseil régional d'Ile-de-France.

La gestion des HLM du 92 était alors assurée par Patrick Balkany, assisté par un certain Didier Schuller, qui bénéficie d'un certain réseau. Des travaux sont à faire, des marchés sont à obtenir, parfois au bénéfice d'amis...

Didier Schuller est poussé au bout de quelques temps à la conquête électorale de Clichy. Il bénéficie des moyens de l'OPDHLM, pendant la campagne le cliéntélisme se met en place. Hors au cours de sa conquête le juge Halphen découvre que le journal de campagne Le Clichois surfacture des pages publicitaires à la SAR, dirigée par un ami de Schuller.

Afin de stopper le juge, Schuller utilise une de ses relations Jean-Pierre Maréchal, beau-frère d'Eric Halphen afin qu'il fasse pression sur lui. Mais au bout d'un moment changement de stratégie : il faut piéger Maréchal et décrédibiliser Halphen. Au cours d'une transaction Maréchal est pris, le juge Halphen risque d'être désaisi. Mais les médias sentent un coup monté, le juge Halphen conserve la gestion du dossier.

Quelques jours plus tard des amis de Schuller sont pris en pleine transaction de dessous-de-table. A leur domicile on découvre des documents impliquant Didier Schuller, qui s'enfuit en République dominicaine. Une cavale de sept ans. Patrick Balkany est lui aussi mis en cause mais sera relaxé.



FAITS DIVERS


Première anomalie du 9-2, le restaurant « Le Ruban Bleu ». Ce restaurant haut de gamme situé à Nanterre est en principe accessible à l'ensemble du personnel du département. Dans les faits on y croise surtout des conseillers généraux et leurs invités. Ainsi en novembre 2006 Manuel Aeschlimann, député-maire d'Asnières, y a été photographié à la sortie d'un repas avec le président du tribunal administratif de Versailles, au moment où celui-ci était mis en cause pour différentes affaires concernant sa municipalité.

Ce restaurant a été bâti par Charles Pasqua pour pallier au manque de restaurants chics dans ce quartier de la préfecture. Le coût du repas? 122 euros en moyenne, alors que les élus ne paient qu'entre 10 et 15 euros en moyenne! Le coût pour le contribuable est lui de 1,8 millions d'euros par an.


Autre anomalie : la SEM Coopération 92, société d'économie mixte créée en 1992 par Charles Pasqua avec pour but l'aide « au développement en Afrique francophone et ailleurs ». Dans la réalité il s'agit d'un véritable « Quai d'Orsay bis », instituant une diplomatie occulte. Elle agit notamment pour un des pays les plus prospère d'Afrique, le Gabon, et notamment le Haut-Ogooué fief du président Omar Bongo. Les contrats sur place sont souvent attribués à un certain Hassan Hejeij, un homme d'affaires libanais.
Cette structure dotée d'un budget de 4,5 millions d'euros fonctionne en toute opacité. Son directeur général Yan Guez à un 4*4 de fonction et un salaire mensuel de 11 000 €.


Impossible de ne pas parler aussi du pôle universitaire Léonard de Vinci à la Défense, plus connue sous le nom de fac Pasqua. Coût total pour le contribuable : 500 millions d'euros, en 2007 il a reçu 17,5 millions d'euros pour ses 1 800 étudiants soit plus que pour les 72 000 collégiens du département (15,6millions d'euros) : soit 9 722 euros par an et par élève, contre 216 euros pour l'autre.

Mais au-delà de ses dépenses la fac Pasqua est surtout soupçonnée de blanchiment au bénéfice du RPF de Charles Pasqua : la fac est gérée par l'Association Léonard de Vinci (ALV) dirigée par Charles Pasqua et ses amis. L'un d'eux, Pierre Monzani, et un de ses amis Noulis Pavlopoulos, ont ainsi réuni 450 000 € venus de Chypre. Mais au final Charles Pasqua est protégé par l'immunité parlementaire.


Dernière structure étonnante du 9-2, la SEM 92, société d'économie mixte créée par Charles Pasqua et qui lui permettra de contrôler l'immobilier, en y plaçant notamment des hommes de confiance. Mais un rapport de la chambre régionale des comptes de mars 1999 met en cause les atteintes à la mise en concurrence des prestataires, la non-observation des lois Sapin de lutte contre la corruption, et s'interrogent aussi sur l'attribution du marché de la fac Pasqua à Bouygues, la vente de terrains Elf à Issy-les-Moulineaux.

Il y eu aussi l'affaire du siège d'Alstom, qui aurait donné lieu à un pot-de-vin de 700 000 €, et de la SOFREMI, qui a donné lieu à des commissions fictives.


dimanche 6 janvier 2008

1788

Rarement la presse française n'aura autant montré son talent. Souvenez-vous, c'était il y a quelques semaines, la SNCF et la RATP se mettaient en grève pour protester contre les dispositions relatives à leur régime de retraite. Et la presse s'est déchaînée : « les nantis », « les privilégiés » prenaient « en otage » des usagers exaspérés. Les journaux télévisés de Jean Pierre Pernault ressemblaient de plus en plus aux appels londoniens du général de Gaulle à la BBC. La cause était entendue.
Cependant diviser la France entre des fonctionnaires privilégiés et des travailleurs du privé qui ne le sont pas relève au mieux de l'inintelligence, au pire de la malhonnêteté intellectuelle : dans le privé la précarité se développe, et surtout il existe de très hauts fonctionnaires (15 000 sur 6,5 millions) qui sont ultra-privilégiés et dont on ne parle jamais.
Cette fonction publique d'en haut n'a pas besoin de la CGT ou de Sud pour défendre ses privilèges : logements ou véhicules de fonction, domestiques...rien à voir avec la fonction publique d'en bas. Les ouvrages « Aux frais de la princesse » d'Yvan Stephanovitch et « Les intouchables » de Ghislaine Ottenheimer ont notamment inspiré cette étude.


AMBASSADEURS DE TOUT LE PAYS, ENRICHISSONS-NOUS!

Le premier privilège de l'ambassadeur c'est son salaire. Le « SMIC » est de 14 000 € mensuels, et dans 25 % des cas le salaire ne descends pas sous la barre des 22 500 €. A ce salaire s'ajoutent des subtilités : celui-ci est ainsi composé à 62 % par une indemnité de résidence.
Cette astuce permet notamment des avantages fiscaux puisque l'impôt se calcule sur le revenu « indiciaire », 3000 €, calculé sans les primes, ce qui permet à certains ambassadeurs de ne pas payer d'impôts malgré leurs salaires!
A ces avantages financiers s'ajoutent des avantages matériels, puisque le contribuable qui rechigne à verser le moindre centime au moindre fonctionnaire (qui selon Jean Pierre Pernault serait un nantis) accepte de fournir aux ambassadeurs des logements bien meublés : meubles, services à vaisselle, ou tableaux de maîtres, et de leur accorder un personnel de maison nombreux (au minimum cinq personnes : cuisinier, femmes de ménages, chauffeurs, jardinier) : ils sont nourris, logés, blanchis et servis par des domestiques.

A côté des ambassadeurs, d'autres hauts fonctionnaires vivent aussi dans l'opulence : les attachés militaires ou les conseillers financiers. Leurs salaires tournent autour de 15 000 € avec des avantages proches : logements de fonction pour certains, repas remboursés, voiture de fonction, mêmes avantages fiscaux, même indemnité de résidence...de quoi rendre jaloux un nantis de cheminot. Ils bénéficient en outre de cinq à huit semaines de congés payés.

Le personnel d'exécution bénéficie de salaires moindres, mais bénéficie lui aussi d'une indemnité de résidence. Il y a aussi 6000 agents recrutés localement, réputés plus dociles et plus silencieux.

Il existe certains abus dans la mesure où certains « piquent dans la caisse » en allongeant faussement la liste des invités lors des réceptions, en mettant peu de choses dans les assiettes, ou en servant du mousseux tout en le facturant au prix du champagne. Certains « rackettaient » leurs invités en leur faisant payer un droit d'entrée, qui allait directement dans leur poche. Ce qui a permis la constitution de caisses noires parfois (ex New York).
Autres abus : l'exemple d'un consul général à Zurich pendant sept ans, qui n'a jamais mis les pieds dans cette ville pendant cette période (peut être trop pris par sa fonction de gendre du Président de la République de l'époque).
Par ailleurs plusieurs ambassadeurs avaient constitué un trafic d'antiquités, un autre avait volé du mobilier national mais ne fut pas inquiété (le fait que sa fille était mariée avec le ministre de l'Intérieur de l'époque n'est probablement que pure coïncidence). Certains trafiquent des voitures, d'autres des tapis. Ainsi un ex-ambassadeur avait transformé sa villa en véritable musée de l'art indien.
L'indemnité de résidence engendre quelques abus aussi : ainsi un ambassadeur a acheté l'immeuble de l'ambassade grâce à cette indemnité et a augmenté le loyer qu'elle lui devait. Celle-ci peut aussi doubler lorsqu'un couple de diplomates est affecté dans un même pays (« le double poste ») : ainsi le fameux couple Gaymard a profité de cette astuce lorsqu'ils travaillaient en Egypte.
Certains postes ont par ailleurs été créés pour surveiller ces excès : les inspecteurs généraux. Les conditions sont dures : cinq mois de voyages annuels, 150 € quotidiens de remboursements de frais divers (même s'ils ne dépensent rien).

Historiquement l'emploi d'ambassadeur s'est constitué en France en 1589, sous Henri III, et à l'époque il était d'ailleurs plus une sorte d'otage visant au respect des engagements sous peine de mort. Le métier s'étoffe, tout comme le personnel. Employé à Venise, Jean-Jacques Rousseau y décrivait l'oisiveté, l'incompétence, les trafics.
Aujourd'hui leur rôle (informer, négocier) est de moins en mois utile, d'autant que la France qui n'est pas la deuxième puissance mondiale possède pourtant le deuxième réseau d'ambassade au monde et les deuxièmes plus fortes indemnités de résidence au monde.

Yvan Stefanovitch nous apprends enfin que deux cousins d'Olivier Besancenot, Hervé et Bertrand, sont diplomates : alors en cas de pépins pour nos camarades superfonctionnaires, le mouvement social sera à vos côtés. En tout cas on peut louer la discrétion du facteur de Neuilly sur ces cousins qui travaillent du côté du grand capital, tout comme sa discrétion sur sa femme éditrice à Flammarion et sur son salaire mensuel de 10 000 euros, tout comme sur son ancien job d'assistant parlementaire au Parlement européen (5 000 € mensuels), moins vendeur médiatiquement que celui de facteur. Mais comme on dit « vivons heureux, vivons cachés ».


LES ACMH, ARCHITECTES EN CHEF DES MONUMENTS HISTORIQUES

Il existe une autre profession particulièrement nantie, sans pour autant être défendue par la CGT ou par Sud ou même dénoncée par Jean Pierre Pernault : les architectes en chef des monuments historiques ou « ACMH ».
Cette profession, comptant seulement 54 personnes, a le monopole pour la restauration des 40 000 monuments historiques. Et c'est ce monopole qui constitue son premier privilège : ainsi elle bénéficie d'un quasi-monopole pour tous les travaux intéressant le ministère de la Culture.
Leurs parts de marché vont s'accroître avec la loi de séparation de l'Eglise et de l'Etat qui leur confie la gestion des édifices religieux où ils remplacent les architectes diocésains.
Ils bénéficient aussi d'une circonscription sur laquelle ils ont un monopole : ainsi à l'époque de l'incendie du Parlement de Rennes (sa « circonscription d'alors), l'Etat a versé à Alain Charles Perrot, interrogé par Yvan Stefanovitch, 18 millions d'euros en frais d'études et de travaux.

Le deuxième privilège des ACMH c'est leur salaire : ainsi Alain Charles Perrot déclare avoir perçu près d'un million d'honoraires de l'Etat en 2002 et toucher 25 000 € annuels, et comme ils bénéficient d'un quasi-monopole sur les monuments historiques les particuliers propriétaires de monuments classés ou inscrits doivent passer par eux, même si leurs prestations sont trois fois plus chères que les autres architectes travaillant dans le même domaine.

Troisième privilège : les logements de fonction. En vertu d'un usage les ACMH logent sur leur chantier : ainsi Alain Charles Perrot loge à l'Opéra Garnier où il a installé ses bureaux, hors ce chantier dure depuis quinze ans. Dans un rapport de 2001, la Cour des Comptes dénonçait ces pratiques. Un ACMH a ainsi logé pendant quinze ans au château de Versailles. Certains indiquent sur l'annuaire ces adresses prestigieuses, car beaucoup utilisent ces logements en logements professionnels.

Par ailleurs cette profession bénéficie d'autres faveurs : elle peut ainsi (c'est le cas depuis le Moyen Age) cumuler ses activités publiques et privées; par ailleurs les ACMH sont contrôlés par eux-même! Ainsi au sein de l'inspection générale des monuments historiques onze membres sur trente trois sont des ACMH, ce qui leur permet d'être à la fois juge et partie, experts et maître d'oeuvre, et de bénéficier en plus pour cette activité d'auto-contrôle d'une indemnité mensuelle de 2 000 €.

De plus la profession est fortement centralisée sur Paris et sa région puisque la moitié des ACMH y travaille, tout comme l'activité : en 2006 la moitié des crédits était consacrée à la seule restauration des monuments parisiens.

Au-delà des ACMH le ministère de la Culture brille par sa générosité en matière de logements de fonction : 882 au total, ce qui est le cas de 230 salariés sur 550 au château de Versailles. A Beaubourg le président loge dans un 274 m². A la villa Médicis à Rome, le responsable gagne 10 000 € mensuels pour surveiller quelques artistes et est logé dans un 380 m² (quid des cheminots? ont-ils aussi des logements de fonction de 380 m²?). Cette villa coûterait 5 millions d'euros au contribuable en simples frais de fonctionnement.


LE PALAIS DU LUXEMBOURG OU LE PALAIS DE CRESUS

Les Gouvernements, si prompts à dénoncer l'inutilité de certaines dépenses, devraient se pencher sur une institution peu utile : le Sénat. Cette institution dont les membres sont élus de manière anti-démocratique (système des grands électeurs) ne brille pas par son activité, mais est par contre un véritable centre de rencontre pour les lobbies.
Mais les employés du Sénat, bénéficiaires d'un statut dérogatoire à la fonction publique, ont des salaires et des avantages importants : à qualification égale ils ont des salaires de 50 % supérieurs aux autres fonctionnaires. Afin de gonfler ces salaires une prime de nuit est attribuée à 50 % d'entre eux alors qu'un tiers seulement est présent lors des séances de nuit, et cela grâce encore à une dérogation qui leur permet de bénéficier de cette prime dès 19h05 contre 0h05 en principe.
Les conditions sont par ailleurs bonnes : ils bénéficient des 32 heures et de dix semaines de congés payés; et vu que le Sénat ne siège qu'un jour sur trois en général, l'activité est loin d'être fatigante.

Vingt huit administrateurs bénéficient en outre de logements de fonction (avec des superficies de 120 à 290 m², pour 600 € par mois), ils bénéficient du téléphone gratuit, d'autres d'un véhicule de fonction avec chauffeur.
Le président du Sénat, lui, gère son « enveloppe » comme bon lui semble : 610 000 € en petits-fours ou 370 000 € en frais de voyages. Et bénéficie d'autres avantages : repas, courrier ou transports ferroviaires gratuits.
Pour le reste du personnel, dix logements de fonction sont attribués, et ils bénéficient de prêts immobiliers à tarif préférentiel.
Les sénateurs bénéficient d'un régime spécial de retraite : 9 ans de cotisations seulement, mieux que les cheminots.
Autre avantage général aux fonctionnaires du Sénat : grâce au « congé spécial » certains fonctionnaires peuvent partir à la retraite dès 55 ans, avec un salaire équivalent à 80 % de leur salaire d'origine.

Le Sénat dispose en outre d'une réserve financière (58 millions d'euros en 1995) que le président de la commission des finances distribue en subventions de manière discrétionnaire.


LES INSPECTEURS DES FINANCES, DIEUX-VIVANTS SUR TERRE

Dans son ouvrage « Les Intouchables » Ghislaine Ottenheimer s'attaque à l'élite de l'élite : l'inspection des finances. Cette profession qui a pour charge le contrôle des services financiers de l'Etat, recrute annuellement les cinq meilleurs énarques consentants. Et leur bilan est louable sous la Cinquième République : un Président de la République (Giscard d'Estaing) et deux premiers ministres (Juppé et Rocard).

Cependant cette élite pratique abondamment le pantouflage, à savoir le départ vers le privé malgré une formation destinée à servir l'Etat. Et si certains ont un bon bilan, ça n'est pas le cas de tous car les plus grandes faillites de ces dernières années en France sont liées à des inspecteurs des finances : Crédit Lyonnais (Haberer), Vivendi (Messier), France Télécom (Bon) ou Alstom (Bilger), citons aussi AGF, UAP, GAN, Bull, Moulinex...ou le PSG.

A l'origine de ces échecs retentissants toute une culture et toute une psychologie : l'inspecteur des finances se croit omniscient, et prends de très haut les manants. Ainsi Valéry Giscard d'Estaing préparait ses interventions TV en s'imaginant parler à une classe de troisième! Idem avec le ton très dédaigneux d'Alain Juppé premier ministre. Et l'image de la chaise vide de Giscard en 1981 et de son fameux « au revoir! » ne sont ni plus ni moins que l'expression du dédain de cette élite à l'égard de la plèbe qui ne comprends décidemment rien.
Lorsque cela va mal c'est toujours la faute des autres ou du contexte : ainsi Jean Marie Messier a sorti un livre pour justifier ses choix à Vivendi, Jean-Yves Haberer ne voit rien à redire sur ses choix au Crédit Lyonnais.
Un sentiment d'impunité aussi : trente cinq d'entre eux ont été mis en examen (5 % de la profession, moyenne française : 0,1 %...), mais sentiment d'impunité justifié : la COB et depuis l'AMF qui contrôlent les opérations boursières sont composées d'inspecteurs des finances, ainsi quand Jean Marie Messier « piquait » l'argent destinées aux réparations des réseaux d'eau, la COB ne trouvait rien à redire. Jean-Yves Haberer affirmait lui déjeuner avec les commissaires aux comptes qui le contrôlaient dans le cadre de l'affaire du Crédit Lyonnais!

Quand ils ne ruinent pas directement la France, les contribuables et leurs actionnaires, ils le font de manière indirecte. Ainsi Alain Minc a créé dans les années 80 la Fondation Saint Simon dont le but était de vendre une pensée raisonnable, la pensée unique libérale, et de répéter aux Français qu'il n'y avait pas d'alternatives à la bonne pensée. Et surtout de faire passer l'intérêt de sa caste pour l'intérêt général.

Mais suite aux échecs retentissants du Crédit Lyonnais, de Vivendi ou de France Télécom, cette élite a été remise en cause, voire remise à sa place : alors que beaucoup n'ont aucune formation en management et aucun vécu du terrain, ils pensent que leur statut d' « élus » les aidera en tout, tout comme leur réseau (grâce à leur « annuaire » qui contient les coordonnées des collègues de formation et « exs » : outil très utile).


LA BANQUE DE FRANCE OU LES ENFANTS DE DON CRESUS

La Banque de France a quant à elle toujours eu une culture des privilèges et des passe-droits. Dès 1800 ses salariés bénéficient d'un statut bâtard : ils sont assimilés à des fonctionnaires pour la sécurité de l'emploi, tout en bénéficiant des salaires de banquiers du privé. Ils bénéficient en outre de divers avantages : ils ne côtisent pas aux ASSEDIC, beaucoup bénéficient d'un logement de fonction même si leur emploi ne le justifie pas, tous bénéficient d'une indemnité de logement (sauf exception). Historiquement ils ont bénéficié de droits sociaux très tôt : droit à la retraite ou médecine du travail.

Le principal avantage de la profession, ce sont les logements de fonction : la banque gère 90 immeubles avec des loyers de 30 % moindres au prix du marché.
Mais ce qui étonne c'est surtout l'identité des locataires. Ainsi Jean Louis Debré bénéficiait d'un logement de fonction du fait de sa fonction de président de l'Assemblée Nationale. Trois autres hauts fonctionnaires de l'Assemblée bénéficiaient aussi en guise de droit acquis d'un 500 m². Rue de Valois la Banque loge 150 locataires : elle y loge des retraités de la Banque (exemple l'ex docteur, 80 ans), Alan Greenspan, ex-directeur de la Banque Centrale américaine y a aussi un logement, tout comme Pierre-Henri Arnstam, producteur-réalisateur à France 2, ou Michel Camdessus. Avenue d'Eylau réside aussi à tarif préférentiel Roger Hanin, plus connu sous le nom de Commissaire Navarro. Mais la liste des bénéficiaires est très longue : responsables et cadres de banques notamment.
Par contre ces locataires savent faire preuve de discrétion : sur leurs boîtes aux lettres il n'y a que des initiales d'indiquées, ou rien parfois.
Dans un rapport de 2005 la Cour des Comptes a critiqué ces déviances.

Mais l'affaire la plus étonnante concerne le Conseil de la Politique Monétaire (CPM) qui a pour but à l'origine de défendre le franc pourtant remplacé par l'euro! Cet organisme existe en effet toujours. Afin de justifier leur poste ces conseillers passent deux jeudis par mois à parler de l'euro, de l'inflation, et ont surtout la dure activité de fixer le taux d'intérêt du livret. Un de se membres reconnaît : « c'est vrai, nous ne servons pas à grand chose ».
Le tout pour 11361 € mensuels (136 339 € annuels), avec en prime une secrétaire, une berline de fonction avec chauffeur, et quelques notes de frais (mais rassurons-nous elles sont limitées à 83 000 € annuels), certains bénéficient d'un logement de fonction.

Dans le même temps la Banque de France a supprimé des milliers d'emplois...mais ne touche rien concernant les droits acquis de ses très hauts fonctionnaires.


SOUS LE SUNLIGHT DES TROPIQUES

Dans son ouvrage Yvan Stefanovitch s'intéresse aussi à l'outre-mer. Si ses propos sur les fonctionnaires d'outre-mer mériteraient plus de modérations, ses propos sur les élus ou représentants de l'Etat sont dignes d'intérêts.
Concernant le représentant de l'Etat à Mayotte, celui-ci travaille dans une partie de l'Ile alors que ses bureaux sont situés de l'autre côté du lagon. Afin de se déplacer il n'utilise pas la navette locale mais une vedette de sept mètres de long, pilotée par un employé de l'Etat, ce qui est déjà un effort de sa part puisqu'en 1996 il avait acheté un bateau de croisière avant de s'en séparer face aux critiques.
A la Réunion le préfet a trois résidences : une à la ville, une à la plage et une à la montagne.

Pour les élus Lucette Michaux-Chevry, élue de Guadeloupe, justifie son amitié à l'égard de Jacques Chirac : elle avait l'habitude d'emprunter du personnel et de la nourriture pour sa résidence privé (en 1995 elle a dépensé 26 000 € en petits-fours!).
Et Lucette est généreuse avec ses directeurs de cabinet tous dotés d'un logement, d'un portable et d'un véhicule de fonction, avec chauffeur. De même pour le chef du service courrier qui a aussi son logement de fonction. Et dire que pendant ce temps là les privilégiés de cheminots multiplient leurs grêves.

En Guyane le conseil général a accordé treize voitures de fonctions avec des cartes d'essence gratuite!
En Nouvelle-Calédonie, l'ex-dirigeant Jacques Lafleur occupe aussi un logement de fonction, mais non seulement il ne paie rien mais le contribuable lui paie 2 200 € mensuels afin qu'il l'occupe!
A la Réunion, vingt cinq membres du conseil général bénéficiaient d'un logement de fonction, parmis eux neuf s'auto-louaient leur logement.

Cependant le maître demeure Gaston Flosse auquel nous avons consacré un dossier (cf « Nos dossiers »). Grâce à l'argent du contribuable, il s'est payé : un atoll à Tupai (5,7 millions d'euros), un avion (13,8 millions), soixante dix véhicules, dont une trentaine de motos et trente sept berlines (avec double immatriculation pour permettre un usage familial), une milice...les frais de la présidence ont augmenté de 400 % en dix ans.
Afin de calmer les contestations, les privilèges se sont élargis : le service d'assistance aux particuliers est ainsi passé de 18 à 140 personnes avec une productivité de 0,6 dossiers traités par jour et par agent!


APRES LES HUSSARDS NOIRS, LES HUSSARDS DU COMPTE EN BANQUE

Autre domaine où existe un fossé entre fonctionnaires de base et hauts fonctionnaires : l'éducation.
Yvan Stefanovitch s'intéresse ainsi à quelques grandes écoles.
Au lycée Henri IV le proviseur dispose d'un F9 de 380 m² avec vue sur le Panthéon. En 2004 il a par ailleurs réalisé des travaux qui ont coûté 11 648 € au contribuable. A part son proviseur, le lycée loge vingt fonctionnaires.
Au lycée Louis-le-Grand le proviseur dispose de 390 m², celui de Jean-Baptiste-Say de 332 m² : l'Education Nationale, avec 43 000 logements, fournit en effet un quart des logements gratuits de la fonction publique.

Le recteur de l'académie de Nice vit lui dans une véritable villa de 350 m² qu'il loue pour 3 500 € mensuels, mais a aussi droit comme tous ses collègues à une voiture de fonction avec chauffeur.

Autre fonctionnaires d'en haut : les professeurs de grandes écoles (Normale Sup, Polytechnique...). Ils gagnent entre 7 500 et 9 000 €, bénéficient de six mois de vacances par an, et touchent même leurs heure supplémentaires pendant leurs vacances. Les « heures de première chaire » permettent aussi d'être payés même s'ils n'effectuent pas des heures de cours, même situation pour les « décharges de services individuelles » qui créé de véritables enseignants virtuels : ainsi il y a des professeurs détachés à l'Opéra de Paris, à l'institut des études judaïques; d'autres à TV5, à la Fondation Nicolas Hulot, au Lobby européen des femmes; il y a aussi les professeurs en surnombre qui ne peuvent enseigner faute d'affectation, leurs disciplines : hébreux, arabe, portugais ou russe, coût pour le contribuable : 100 millions d'euros.


Dans son dossier « les Gaymards de la République » le Canard Enchaîné avait déjà dénoncé ces privilèges, mais on ne peut qu'être étonné par le silence sur un système dont on ne voit que certaines affaires (Hervé Gaymard, Jean-Paul Bolufer...), qui ne sont que la partie immergée de l'iceberg.
Au fond la France n'a rien perdu de sa culture « Ancien Régime » : entre le Tiers Etat, le nouveau clergé (certains économistes, nous n'avons affaire qu'à une nouvelle aristocratie qui a compris qu'au pays des aveugles, le nantis est roi. Pierre Mendès-France déclarait en 1953 : « nous sommes en 1788 ». L'avenir nous dira si ces propos sont toujours d'actualité.

mercredi 5 décembre 2007

PARADIS FISCAL, PARADIS LEGAL?

Qu'est ce qu'un paradis fiscal? A cette question beaucoup répondent qu'il s'agit seulement d'îles exotiques permettant à des mafieux ou délinquants de blanchir leurs fonds, et d'éviter de payer des impôts.

Pourtant la réalité est plus complexe et plus sérieuse. Dès 1968 Alain Vernet du Figaro les avait qualifié de « bas fonds de la finance internationale » : en effet ils font aujourd'hui partie intégrante du système économique mondial et entrent dans la stratégie des entreprises. Par ailleurs l'Europe, contrairement aux idées reçues est très en avant en matière de paradis fiscaux : pas besoin en effet d'aller très loin pour pouvoir placer ses fonds « au chaud ».


QU'EST CE QU'UN PARADIS FISCAL?

Définir un paradis fiscal n'est pas chose aisée. En effet, que ce soit au niveau national ou au niveau international il n'existe pas dans la législation ou dans la jurisprudence de définition précise.

Cependant les travaux de l'OCDE et le rapport Gordon (rapport de l'administration fiscale américaine) retiennent quelques critères :

- les paradis fiscaux se signalent tout d'abord par une fiscalité basse, notamment celle sur le capital des non résidents

- ils se signalent aussi par le secret bancaire ou commercial. Concernant le secret bancaire certains pays le considèrent ainsi comme un élément de l'ordre public (Suisse, Monaco), comme un droit de l'Homme (Luxembourg), comme un devoir professionnel pénalement sanctionné (Suisse), comme un élément de la sécurité étatique (Liechtenstein). Avec parfois des conséquences scandaleuses (affaire des avoirs juifs, affaire Sani Abacha)

Concernant le secret commercial, cela concerne surtout les pays anglo-saxons régis par la « common law », qui limite tout formalisme, et tolère de ce fait une forme d'opacité. Idem pour différentes formes de sociétés (trusts, fiducies, anstalt...) présentes dans les paradis fiscaux

- une coopération judiciaire internationale faible vis-à-vis d'autres Etats instituant une forme d'impunité en matière de délinquance financière

- divers critères secondaires : secteur financier très développé par rapport à la taille du pays; facilité d'installation et de création des entreprises; stabilité économique et politique; bonnes infrastructures de communication et de transport; rareté des conventions fiscales; faiblesse des dépenses publiques; législations anti-blanchiment ou lutte anti-blanchiment faibles


INTERET DES PFJ

Tout d'abord l'intérêt des paradis fiscaux est financier : les 65 paradis fiscaux géreraient ainsi 6000 milliards d'euros, et représenteraient près de la moitié des flux financiers mondiaux. Ils accomplissent des investissements directs à l'étranger à hauteur de 200 milliards d'euros annuels : ainsi 20 % des investissements réalisés en Chine le sont par les Iles Vierges, qui y investissent plus que le Japon ou les Etats Unis, les Iles Caïmans et les Iles Samoa. Le premier investisseur en Inde est l'Ile Maurice. Les Iles Caïmains sont devenus la cinquième place financière au monde. Les paradis fiscaux sont les deuxième détenteurs d'obligations d'Etat américaine.

Surtout les paradis fiscaux ont connu un développement exponentiel ces dernières années : alors qu'ils n'étaient que 25 dans les années 70, ils sont aujourd'hui 65, selon un rapport de l'OCDE leurs avoirs auraient augmenté de 500 % entre 1985 et 1994. Il y aurait 2,4 millions de sociétés écrans dans ces paradis fiscaux.

Les effets sont divers : un manque à gagner fiscal pour les Etats (des services publics affaiblis et un déplacement de la charge vers les plus pauvres : « seules les petites gens paient des impôts! », s'exclamaient ainsi Leona Helmsley, milliardaire américaine, lors de son procès en 1989), une concurrence fiscale entre Etats les obligeants à baisser leur imposition sur le capital en le reportant sur les particuliers (au Pérou les entreprises étrangères ne paient quasiment pas d'impôts), la possibilité pour des multinationales de truquer leurs comptes, une instabilité financière mondiale accrue du fait de l'absence de contrôle de ceux-ci.

Les paradis fiscaux ont aussi joué un rôle dans diverses crises financières mondiales : par leur volatilité (crise en Asie du Sud-Est, en Argentine, au Mexique ou en Russie), ou par leur aptitude à dissimuler des dettes (Parmalat, Enron, Worldcom). Ainsi en 2001 le Brésil a vu s'envoler 4 milliards de dollars rien que vers les Bahamas et les Iles Caïmans.


PARADIS FISCAUX ET NEO-CAPITALISME

Dans le capitalisme présent, fondé sur les monopoles, le refus de la régulation et une paupérisation, les paradis fiscaux jouent un rôle majeur :


- une première pratique : les prix de transfert

Cette pratique permet d'optimiser les profits entre une entreprise et ses filiales en manipulant les prix de transaction. Simon J. Pack a ainsi relevé ces abus : sable importé 2 000 dollars la tonne (contre un prix mondial moyen de 10 dollars), ampoules de flash à 300 dollars (contre 10 cents), mitrailleuses à 364 dollars (contre 2 000 dollars), pneus à 8 dollars (contre 200 dollars)...

Selon un sondage mené par le cabinet Ernst and Young auprès de 476 multinationales réparties dans 22 pays, cette stratégie serait utilisée par 77 % des entreprises sondées!


- une autre pratique : la corruption

Les sommes considérables qui transitent dans les paradis fiscaux peuvent également provenir de la corruption : le corrupteur, qui peut être un vendeur d’armes, ou une compagnie pétrolière en quête de permis d’exploitation, va ouvrir au corrompu, le décideur dont dépend la signature de son contrat, un compte bancaire dans un paradis fiscal.


- une autre pratique : cacher ses dettes

Cette méthode permet de faire apparaître aux investisseurs potentiels un bilan comptable plus sain, voire truquer purement et simplement ces comptes. Cette méthode a été utilisée par Vivendi Universal, Enron, Parmalat ou Worldcom : Enron avait ainsi 800 sociétés écrans dans des paradis fiscaux, dont 600 aux seules Iles Caïmans, avec une seule boîte postale! Parmalat a elle réussi à cacher 11 milliards d'euros de dettes par ce biais.


- les « professionnels » jouent aussi un rôle non négligeable dans l'utilisation des paradis fiscaux

Les banques ainsi en profitent ainsi pour récupérer des commissions liées à la commercialisation de leurs produits opaques : Citigroup a ainsi été mise en cause dans les affaires Enron et Parmalat, Chase Manhattan dans l'affaire Enron, la Deutsch Bank a elle monté un système organisé de fraude fiscale.

Les compagnies d'assurance dites captives sont des filiales d'assurance créées par les multinationales pour assurer toute ou partie de leur activité afin de s'auto-assurer, ce qui leur permet de payer moins de primes, notamment en les installant dans des territoires qui ont des contraintes réglementaires limitées.

Les professionnels du Droit sont les « ouvreurs de porte » vers les paradis fiscaux : ils profitent de leurs connaissances et des lacunes légales pour vendre à leurs clients des stratégies opportunes. Sont ainsi mis en cause les « Big Four », quatre grands entreprises du conseil international (Ernst & Young, KPMG, PricewaterhouseCoopers et Deloitte Touche Tohmatsu) qui sont à la fois des conseillers et contrôleurs de comptes – souvent les deux à la fois, au risque du conflit d'intérêt – des entreprises : ils contrôlent les 500 plus grosses multinationales dans ces deux domaines. Au-delà de ces cas, les banquiers d'affaire, avocats ou experts comptables sont mis en cause.


- divers autres pratiques

Certaines entreprises comme Microsoft profitent aussi de ces paradis fiscaux pour y dissimuler la rente que leur procurent leurs brevets : 500 millions de dollars annuels dans le cas de Microsoft, gérés par une entreprise située en Irlande.

Aux Etats Unis le « Foreign Sales Corporation » permet aux entreprises d'être plus compétitives à l'exportation, avec une défiscalisation possible pour l'exportation dans certains domaines, en passant par des paradis fiscaux (Barbade, Iles Vierges) : une évasion fiscale au nom de la compétitivité.

Les banques peuvent aussi profiter des paradis fiscaux pour solder leurs dettes comme l'a fait le Crédit Lyonnais, ou dissimuler une OPA.

Surtout les paradis fiscaux représentent une oasis pour le blanchiment de capitaux d'origine criminelle.


LE LIECHTENSTEIN

Si ce pays est un des plus petit en Europe, il s'agit aussi d'un des plus riche.

Ce pays se distingue tout d'abord par une fiscalité favorable (notamment sur les sociétés et sur les placements des non-résidents), par une stabilité politique (opposition politique et médiatique quasiment nulle), une réglementation financière et commerciale faible, des faibles moyens financiers et humains dévolus à la lutte contre le blanchiment. Cependant ce qui fait le dynamisme du Liechtenstein c'est avant tout son culte du secret bancaire : celui-ci fait parti de la loi sur la sécurité de l'Etat, voire de l'ordre public.

Le Liechtenstein se distingue aussi par les structures juridiques de certaines de ses entreprises qui garantissent l'anonymat. Ainsi les « Anstalt » sont des sociétés faciles à constituer et soumises à des obligations sociales quasiment nulles. Dans ces sociétés, le pouvoir est délégué à un homme de paille, ce qui permet de cacher les vrais ayants droits économiques (ce qui fut le cas dans l'affaire Elf). Le Liechtenstein se distingue aussi par ses sociétés de domiciliation, 75 000 au total, qui ne sont en fait que des sociétés « boîte aux lettres ».

Ce qui distingue aussi le Liechtenstein, c'est son absence de scrupules concernant l'origine des fonds selon le BND, services secrets allemands. Selon eux le pays recyclerait l'argent des mafias italiennes, russes et colombiennes, ce qui est d'autant plus facile que leur système protège l'identité des propriétaires des fonds.

Le rapport du BND dénonce aussi une collusion entre les criminels des cartels de drogue et certains notables de la principauté, avocats ou gérants de fiduciaires qui leur permettent ainsi de blanchir leurs capitaux.

En matière de coopération judiciaire le Liechtenstein est un des Etat les moins coopératif : les commissions rogatoires internationales donnent ainsi rarement suite. Pour ce faire les autorités se fondent sur la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959 qui permet de fonder le refus d'une entraide judiciaire sur l'ordre public : selon le Liechtenstein le secret bancaire ferait donc parti de son ordre public. Par ailleurs les demandes d'entraides judiciaires sont soumises à un processus long et compliqué.

Enfin le Liechtenstein ne possède pas de fichier FICOBA (fichier national des comptes bancaires), et autorise l'ouverture de comptes au profit d'une autre personne : un avocat ou un gérant de fiduciaire peut donc ouvrir un compte au profit d'un de ses clients, celui-ci restant anonyme!

Depuis le Liechtenstein a fait des efforts législatifs, mais ceux-ci restent de façade et limités par une certaine mauvaise volonté politique et des acteurs économiques.

Pour résumer, le Liechtenstein se distingue par un culte du secret (que ce soit en matière bancaire ou dans la structure de certaines entreprises qui garantissent l'opacité), une mauvaise coopération judiciaire, une ouverture aux milieux criminels, et une collusion de certains notables locaux avec ceux-ci.


LA GRANDE BRETAGNE ET SES DEPENDANCES, GIBRALTAR

Londres est la première place financière du monde et se distingue par son caractère international.

Ce qui caractérise Londres, et la City, véritable Etat dans l'Etat, c'est avant tout la structure de ses sociétés, véritable passeport à l'opacité. Contrairement aux pays latins se fondant sur un certain formalisme, la Grande Bretagne et ses dépendances sont régis par la common law, qui permet à la fois de créer très facilement une entreprise, avec peu d'obligations sociales, et surtout une grande opacité de fonctionnement : ainsi les « trusts » permettent de garantir l'anonymat des ayants droits économiques, et sont parfois des sociétés écrans, des coquilles vides permettant de blanchir des capitaux (exemple l'ARC qui avait 2000 sociétés écrans à l'Ile de Man).

Par ailleurs la coopération est extrêmement compliquée : un magistrat raconte ainsi que pour faire une enquête il devait interroger la police britannique, qui interrogeait la police de la City (elle possède une police propre), qui devait interroger un avocat, qui interrogeait un banquier! Gibraltar ne répond jamais aux commissions rogatoires internationales, et la coopération des autres est faible (Man, Jersey, Guernesey...). Comme le Liechtenstein, la Grande Bretagne oblige les demandeurs d'une entraide judiciaire à avoir des preuves d'un fait délictueux afin de fournir des preuves de celui-ci...au mépris de la Convention de 1959, qu'elle a signée.

Le dispositif de lutte anti-blanchiment est aussi réduit : absence de moyens financiers et humains, faiblesse des poursuites et des condamnations, il se fonde surtout sur l'auto-régulation...

Par ailleurs ces Etats se caractérisent par le rôle des « ouvreurs de porte », à savoir le rôle de professionnels du droit qui profitent de leurs connaissances, des insuffisances législatives, et de leur caution pour introduire leurs clients vers les paradis fiscaux et le blanchiment de capitaux. Hors ces professions sont peu réglementées en Grande Bretagne.

De plus la Grande Bretagne n'a pas non plus de fichier FICOBA, et fonde le secret bancaire sur l'habeas corpus et l'exercice de la liberté individuelle.

Même situation dans les territoires d'outre-mer : Iles Caïmans, Iles Vierges, Bermudes, Turks et Cairos, Anguilla, Montserrat.

Cependant il y a eu une évolution depuis quelques années, notamment avec l'arrivée de Blair en Grande Bretagne. Cependant de peur d'effrayer les grosses fortunes, pas de révolution. Gibraltar a elle tout de même radié 20 000 sociétés fictives.

Pour résumer, les paradis fiscaux de la Couronne britannique se caractérisent par un droit des sociétés favorisant l'opacité et les sociétés écrans, une coopération judiciaire faible, et un dispositif interne de lutte contre le blanchiment réduit.


LE LUXEMBOURG

Le Luxembourg est aussi un des pays au monde qui possède le PIB par habitant le plus élevé.

Il se signale par les mêmes élèments que les autres paradis fiscaux et judiciaires : une fiscalité faible pour les non résidents; un culte du secret bancaire (considéré comme un droit de l'homme), la faiblesse des moyens financiers et humains de lutte contre le blanchiment (l'auto-régulation prime, et l'application du corpus législatif est freinée par la réticence des financiers).

Le Luxembourg se signale par sa capacité à créer des formes de sociétés génératrices d'opacité : les holdings 1929, les SOPARFI, les fiducies, les domiciliations de société, toutes soumises à un régime fiscal favorable et à un encadrement légal a minima (pas de registre central d'immatriculation des sociétés...), pain béni pour la constitution de sociétés écrans.

Par ailleurs, dans le rapport de la commission parlementaire sur le blanchiment de capitaux sur le Luxembourg (30 mars 2000), Joël Bucher, ancien directeur général adjoint de la société générale de la Société Générale interrogé sur l'affaire des rétrocommissions sur les frégates vendues à Taïwan indique que la Société Générale a ouvert des comptes au Luxembourg afin d'y verser les rétrocommissions (lors du passage d'un marché, celui-ci peut être facturé pour dégager une commission occulte, la rétrocommission est la partie de cette somme revenant vers le pays d'origine des versements). Il indique même que de nombreuses personnes conseillaient à ceux qui recevaient des commissions occultes d'ouvrir un compte au Luxembourg!

Ce même rapport relate aussi une enquête menée par le magazine Challenges en mars 2000 dont des journalistes indiquent à cinq banques luxembourgeoises qu'ils souhaitent placer 900 000 francs « au black ». A Cortal Bank, on lui conseille de placer la somme en plusieurs fois, grâce à quelques amis, afin d'éviter les problèmes. Au Crédit Lyonnais, on lui conseille de passer par un homme de paille pour faciliter la transaction. A la Société européenne de banque, no problem sur l'origine cachée des fonds.

Mais le Luxembourg c'est aussi le pays de Clearstream...afin de simplifier, dans cette affaire sont mis en cause le système informatique des transactions bancaires (SWIFT), la possibilité pour les banques – Clearstream n'est censé ne s'adresser qu'aux banques – d'ouvrir des sous-comptes qui permettent des transactions financières confidentielles, des dissimulations ou la constitution de caisses noires. Un ancien haut employé de Clearstream indique qu'on l'avait aussi chargé de faire du « hard coding », à savoir rectifier le programme source pour dissimuler des transactions. La Justice est censée être en charge du dossier.


LA PRINCIPAUTE DE MONACO

La Principauté se distingue elle aussi par une fiscalité allégée. Celle-ci fait notamment polémique car en vertu d'un accord fiscal de 1963 entre la France et Monaco, la France verserait annuellement des centaines de millions d'euros à la Monaco au titre de la répartition de la TVA! En gros le contribuable français paierait pour permettre aux Monégasques d'être un paradis fiscal au vu de la faiblesse voire de l'absence de certaines impôts...Cette aide publique au blanchiment est la première ressource budgétaire de la Principauté.

Est notamment mis en cause un mode de calcul contestable qui favorise Monaco : http://www.voltairenet.org/article8430.html, à voir aussi les arguments des autorités monégasques : http://www.gouv.mc/364/wwwnew.nsf/1909$/d79f49c076aef190c1256ff0002bcaecfr?OpenDocument&4Fr

Sinon l'opacité y est aussi de mise : formes de sociétés favorables à l'anonymat (trusts, sociétés de capitaux, fiducies), absence de fichier FICOBA, absence d'obligations à l'encontre des banques.

Les banques sont peu regardantes sur l'origine des fonds : la moitié des dossiers de renseignements concernant leurs clients sont soit vides, soit mal renseignés. Elles sont aussi favorables au silence et au secret.

La Justice est peu indépendante, victime de pression hiérarchique afin d'éviter que des condamnations judiciaires effraient les investisseurs. Peu de moyens financiers et humains (deux personnes seulement au SICCFIN pour contrôler 50 milliards d'euros d'avoirs!).

En matière de coopération internationale même chose : refus de traitement des commissions rogatoires internationales, au nom de l'ordre public.


LA SUISSE

La Suisse a une réputation bancaire ancienne. Mais a aussi quelques « casserolles » : financement des activités du Troisième Reich, refus de restituer les avoirs juifs après la Seconde guerre mondiale.

Le secret bancaire est une obligation professionnelle, pénalement sanctionnée. La fiscalité est favorable aux non-résidents (90 % des fonds déposés font l'objet de l'évasion fiscale de leur pays d'origine). Elle connait aussi des sociétés favorables à la dissimulation de fonds (fiducies). Comme les autres paradis fiscaux et judiciaires elle a une législation de façade, et consacre peu de moyens financiers et humains à la lutte anti-blanchiment.

Les banques sont aussi mises en cause : elles se régissent par l'auto-régulation, sont peu actives (elles peuvent accepter l'argent du crime ou ceux de dictateurs).

En matière judiciaire, la division par cantons ne facilite pas la tâche, en matière de coopération judiciaire, la procédure est complexe, avec beaucoup d'intervenants, elle n'hésite pas à refuser la coopération en se fondant sur une exception au principe posé par la Convention de 1959 : les infractions fiscales.


POINTS COMMUNS DES PARADIS FISCAUX

Hormis ces états européens sur lequel on insiste au motif de leur proximité et que cette filière est peu évoquée, les autres paradis fiscaux ont diverses spécialités : assurance et réassurance (Bermudes), l'e-commerce (Bahamas), les fonds d'investissements (îles Caïmans), la domiciliation d'entreprises (Iles Vierges), les exportations américaines (la Barbade), le droit de propriété intellectuelle (Irlande), pavillons de complaisance (Libéria).


En tout cas comme on le voit les paradis fiscaux partagent beaucoup de points communs.


- tout d'abord l'opacité : opacité dans la formes des entreprises qui permettent de dissimuler les ayants droits économiques et font fonction de sociétés écrans facilitant le blanchiment de capitaux; opacité aussi dans le culte du secret bancaire; opacité aussi dans les règles a minima de création et de vie des sociétés

- ensuite une défense de cette opacité : par le manque de coopération internationale, au mépris de leurs engagements conventionnels parfois; par un manque de moyens financiers et humains dans la lutte anti- blanchiment; un manque de volonté évident de la part des intermédiaires financiers

- une fiscalité basse

- notons cependant que les initiatives françaises, européennes et internationales ont engendré une évolution législative de la part de beaucoup de pays, encouragé par l'atteinte à la réputation de leur place financière, même si cette évolution est bien souvent de façade. Reconnaissons à l'Europe et notamment à la France un rôle moteur en la matière


DES SOLUTIONS CONTRE LES PARADIS FISCAUX

Depuis la mobilisation du début des années 2000, il y a eu quelques avancées : de nombreux Etats ont fait des efforts pour instituer plus de moyens dans la lutte contre le blanchiment de capitaux, légiférer sur certaines sociétés opaques ou coopérer judiciairement.

Cependant ces évolutions sont souvent des évolutions de façade : le système n'a pas été remis en cause, quelques Etats insignifiants ont servis de bouc-émissaires, le secret bancaire est toujours en place dans certains Etats, et la législation est souvent lacunaire.


Un dipositif existe déjà au niveau international : le GAFI a établi 49 recommandations et une liste noire, l'OCDE et l'ONU travaillent aussi sur ce point, tout comme le Forum de stabilité financière établi par le G8.

Divers solutions sont envisageables autour de certains axes :


- harmoniser

Il convient d'harmoniser la fiscalité (par le biais notamment de la directive européenne sur l'épargne dont le champ limité doit être étendu et s'occuper du problème de la taxation de l'épargne des non résidents,) afin de prévenir de la concurrence fiscale entre Etats.

Il convient aussi d'harmoniser la légalité, notamment le droit des sociétés et le droit des affaires. Pour le droit des sociétés il faut légiférer sur les sociétés opaques (trusts, fiducies, anstalt, holdings, sociétés de domiciliation...) : une charte internationale, avec des normes minimales est ainsi envisageable. En cause : identifier les ayants droits économiques et prévenir l'anonymat et l'opacité, et un minimum de vie sociétale : le déroulé d'assemblées générales, la publication de comptes, l'obligation d'immatriculation ou l'inscription sur un registre central. Il serait nécessaire aussi d'harmoniser le droit pénal : pour certains l'évasion fiscal ou la fraude ne sont pas considérés comme délictueux.

Il convient aussi de permettre la levée du secret bancaire en cas de demande de coopération judiciaire internationale et de lever les conditions supplémentaires excédant la convention européenne de 1959. Il faudrait aussi généraliser les fichiers bancaires de type FICOBA.


- réguler

Il convient aussi de réguler l'activité économique dans certains domaines : afin de contrôler le capitalisme, il faudrait imposer un minimum de règles économiques.

Il s'agit tout d'abord de règlementer les différentes professions susceptibles de faciliter l'accès aux paradis fiscaux; il convient aussi d'instituer un contrôle plus rigoureux des comptes des entreprises, avec l'obligation que leur certification de comptes, obligation en cas de cotation boursière, s'étendent à l'ensemble de leur activité (même à des territoires exotiques); il convient de contrôler plus sérieusement les transactions avec les banques de compensation (Clearstream, Euroclear, SWIFT...).


- sanctionner

Le magistrat Jean de Maillard affirmait que les paradis fiscaux voulaient organiser un « monde sans loi ». Il appartient donc de sanctionner les différentes dérives.

Cela passe déjà par une responsabilisation accrue des différents acteurs économiques en étendant l'obligation de déclaration de soupçon à plus de professions, étendre l'obligation de vigilance en pénalisant la négligence.

Concernant les autorités de contrôles existants : il convient de judiciariser TRACFIN, d'accroître les pouvoirs du GAFI (et que sa liste soit plus crédible : la Suisse a présidé le GAFI en 1992), afin que ses normes aient un caractère impératif.

Il convient surtout d'internationaliser la justice : instituer une autorité mondiale de régulation afin d'avoir une régulation transnationale, favoriser la coopération internationale.

Il faut aussi dépasser le stade de l'autorégulation et aller vers une plus grande sanction; il faut mettre plus de moyens financiers et humains dans la lutte contre le blanchiment de capitaux. Il est possible aussi de sanctionner les pays non-coopératifs en instituant une taxe dans les transactions avec elles.

Il convient (à terme...) d'interdire aux banques françaises d'avoir des filiales dans les paradis fiscaux, de sanctionner les firmes passant par eux en les interdisant de marchés publics, de garantie publique (COFACE).


Grâce aux pressions conjuguées de la France, de l'Italie, de l'Union européenne, du GAFI, de l'OCDE, de l'ONU ou du G8, il y a eu d'importantes évolutions dans les paradis fiscaux, mais rappelons-le ces évolutions sont souvent de façade et les « attaques » contre les paradis fiscaux ont souvent visé des pays marginaux, qui firent offices de bouc-émissaires, alors que les plus puissants passaient entre les mailles du filet.

D'un point de vue judiciaire, la Cour de justice européenne a mis en cause les montages artificiels liés à l'utilisation des paradis fiscaux (arrêts Halifax en avril 2005, Cadbury Schweppes en mai 2006, confirmés en 2007).

Malgré ces évolutions, le système n'a pas été fondamentalement remis en cause. Il convient donc de continuer le travail. Un travail long, mais comme le disait Saint Just, « il n'y a que ceux qui sont dans les batailles qui les gagnent ».